CABOU

Obligation

(mardi 25 août 2020)

Mise à jour audio du 17 juin 2024, sur la première moitié

Dis-moi, François,
est-ce que tu penses
qu’Emmanuel Macron,
élu produit de l’année 2017,
a réussi à devenir le leader
sur sa part de marché,
grâce au concept-clé
de « start-up nation ? »

Ah bah, alors là,
je n’en sais rien,
ma pauvre dame...

Moi je constate juste
que le produit
n’est pas encore arrivé
à sa date de péremption
et qu’il est déjà
largement éventé,
altéré, suranné, périmé,
disons-le clairement :
l’est complètement frelaté !

Le moins
qu’on puisse dire,
c’est qu’il ne s’agit
pas vraiment
d’un produit d’avenir...

Et malgré ça,
on nous sort toujours
l’emballage d’origine,
avec la même propagande
débile
sur le « Numérique inclusif ».

Faut pas se laisser souffler
par les mots venteux.

« Numérique inclusif »
ça ne veut pas dire
qu’on va accompagner
la population
afin que personne
ne soit exclu
de l’accès
aux savoirs.

« Numérique inclusif »
ça ne veut pas dire
qu’on va accompagner
la population
pour lui permettre
d’exprimer LIBREMENT
sa créativité
avec des outils
accessibles,
indépendants,
standardisés
et bon marché.

« Numérique inclusif »
ça ne veut pas dire
qu’on agira
concrètement
pour sortir la société
de sa dépendance
aux grands réseaux
centralisés
parasitaires
et malfaisants.

« Numérique inclusif »
ça ne veut pas dire
qu’on se donnera
les moyens de rompre
avec la responsabilité
accablante
de l’industrie numérique
dans la destruction
de la planète.

« Numérique inclusif »
ça ne veut pas dire
que la population
aura le droit
de décider
de son futur.

« NUMÉRIQUE INCLUSIF »
ÇA VEUT JUSTE DIRE
QUE, DÉSORMAIS,
L’USAGE DU NUMÉRIQUE
EST OBLIGATOIRE !

Obligatoire,
pour le commerce.
Obligatoire,
pour l’administration.

Voilà
le sens profond
de « Start-up nation » :
user du pouvoir
régalien de l’État
pour obliger la société
à bouffer et à chier
du capitalisme
numérique.

Toi-même, camarade,
si tu me permets
cette remarque
fraternelle,
il me semble
qu’un petit effort
d’imagination
s’imposerait,
car parfois,
à t’entendre,
on pourrait croire,
que le communisme,
c’est les AG
plus WhatsApp…

Voilà
où on en est
rendu :
pour la moindre
broutille commerciale,
administrative,
ou militante…
on nous sert toujours
la même came :
service en ligne !
service en ligne !
service en ligne !

Et tout ça
renforce
tant et plus
le pouvoir
des hommes
les plus riches
de la planète.

Ya t-il quelqu’un dans la salle
pour nier cette évidence ?

Moi, qui ne suis
qu’un homme de base,
payé pour
accompagner la population
sur des ordinateurs,
je suis bien placé
pour observer
en quoi
ce « NUMÉRIQUE INCLUSIF »,
est, en fait,
TOTALEMENT INTRUSIF.

Bien placé
pour observer
comment l’obligation
s’est instituée,
au fil du temps,
avec la contribution active
de l’administration publique...
Merci pour le service !

L’obligation
ne peut que
créer du rejet,
qui crée
encore plus
d’obligation,
qui crée
encore plus de rejet
et ainsi de suite,
jusqu’à
l’explosion probable
de révoltes
légitimes.

On connaît la suite.
On sait comment
le pouvoir répond
aux révoltes.

On sait comment
ces messieurs
se pincent le nez
et considèrent
ceusses
qui refusent
cet avenir,
soit-disant
inéluctable.

Parfois, le refus est violent,
car la lutte sociale
est toujours violente,
même si l’on sait
- ou l’on devrait savoir -
qu’on ne gagnera jamais
sur le plan militaire.

Quelle que soit la casse [1]
ou l’absence de casse,
la lutte de ceusses
qui se donnent le droit
de ne plus subir
leur propre vie,
sera toujours
trop violente
pour ces messieurs,
qui décident
ce que doit être
la vie des autres.

Ces messieurs parlent
à la place des autres :
soit-disant
que
nous autres,
réfractaires,
ne serions
pas capables
de comprendre
le progrès.

Soit-disant
que
nous
ne serions pas
capables
de comprendre
à quel point
ce présent
porte DÉJÀ
un futur
si fascinant.

Nous
ne serions bon
qu’à nous
tourner
vers le passé,
parce qu’il va de soi,
que refuser leur présent
c’est forcément
plonger
dans la fange
rétrograde
de la réaction,
voyez-vous.

S’il
nous
venait l’idée
de nous révolter
en brisant le matériel
de nos exploiteurs,
nous serions
alors accusés
d’obéir
à quelques pulsions
primitives
obscurantistes,
voyez-vous.

Pas capables
de discerner
les bienfaits
de l’innovation
et du progrès,
alors que tant
de têtes débordantes de cervelle
s’emploient
à trouver
les solutions
à tous nos problèmes.

Vous êtes trop bons,
mes seigneurs...
mais quand je vois
où nous conduit
votre scientifique
intelligence,
qu’elle soit naturelle
ou artificielle,
dites-vous bien
que, moi,
JE PRÉFÈRE RESTER BÊTE !

Je ne me fais
aucune illusion,
messieurs les intelligents.
sur le sort que vous réservez
à nous aut’ les bêtes.

Il n’y a qu’à voir
votre seul regard,
qui en dit tant
sur vos intentions.

C’est le même regard,
plein de condescendance,
de mépris
et de dénigrement
que vos semblables,
en d’autres époques,
ont toujours porté
sur les révoltés
de leur temps.

Car contrairement
à ce que vous dites,
notre révolte
contre votre monde
n’est pas une révolte
contre notre temps,
puisque ce temps
nous appartient
et qu’il serait
question
de vous en chasser

Bonsoir Messieurs.

00:00 / 5:51

 
 
Notes :

[1Si la casse est spectaculaire,
alors BFM-YouTube-Facebook
& consorts en seront
les principaux bénéficiaires.