Prenez garde, camarades !
Zombies, Aliens ou Cthulhu
ne représentent aucune menace.
Ce sont, au contraire, les spécimens
les plus ordinaires de l’espèce
qui entraîneront notre perte.
Nous adorons imaginer les pires terreurs
sans voir que notre banal grouille d’horreurs.
Nous nous adaptons aux réalités les plus déplaisantes,
telle une grenouille dans sa casserole fumante.
Les parois tremblent au passage du bulldozer,
ne reste alors qu’à prendre les jambes à son cou.
Le centre de surveillance calcule en temps réel
si "mouvements de foule" génère "insécurité".
Vous ne pouvez ignorer que,
de coulées blanches en marres de sang,
la planète transpire d’épouvante.
On produit du meurtre de masses
pour une poignée de dollars
et le plaisir de remettre la mise.
Nous crions au monde l’évidence de notre révolte,
pour démettre la classe désinvolte.
Nous sommes charmé·es par l’éclat de nos voix cassantes,
échos de certitudes galvanisantes.
La rue s’émerveille et vibre de tant d’audace
mais c’en est trop, le bunker hurle son comeback :
le ciel se tourne en vrille et balaye d’un souffle
la fourmilière d’émeutiers en déroute.
Entendez-vous, camarades,
ce chaos d’ultra-violence
qui résonne en feedback dans votre tête ?
Ce n’est ni Mad Max, ni Matrix, ni Blade Runner,
mais juste du concentré de réel en boîte.
Nous nous perdons dans des postures sectaires,
certains jouant même le rôle de dieu-le-père.
Nous oublions notre but : anéantir un système
et non de voir « les autres » comme un problème.
Le sol se dérobe, les passions folles, d’elles-mêmes,
se désagrègent, avant de prendre corps.
Les contre-pouvoirs, minés par de vaines querelles,
assistent, pétrifiés, à leur faillite.