CABOU

en mémoire de nos oublis

(mercredi 5 avril 2023)

ayant accepté le triomphe de la marchandise
jusqu’à me vendre moi-même pour m’y perdre sans raison

je reste entreposé dans une zone de chalandise,
nichée au plus profond de l’intime, dans ma propre maison

je rêve d’une fuite, avant qu’on me l’interdise,
excitant mon esprit à concevoir d’autres liaisons

embarqué en eaux mortes, dans une coque de noix
en mémoire de nos oublis, peau fripée, sabre de bois

j’esquive le brut, le net et toutes ces ritournelles
sur le travail, la valeur et autres anesthésiants

un flash d’info, entouré de débris de cervelle,
affiche la capture d’écran d’une ligue de mendiants

je contourne un flux saumâtre de statistiques formelles
à propos de la violence légitime contre les sujets déviants

le buste du président, entouré d’un feu de poubelles,
s’illumine d’un déluge de grenades et de gaz asphyxiant

embarqué en eaux mortes, dans une coque de noix
en mémoire de nos oublis, peau fripée, sabre de bois

la ci-devant caste bourgeoise non létale et technocratique
lance des hordes de robots dressés comme des humains

une escouade de managers, scande des chants patriotiques
sur l’air du dog whistle, tout tir tendu contre les vilains

des tribus de ministres et de préfets autocratiques
font bouillir la bassine fumante d’un RN bientôt souverain

rien ne pourra m’extraire du décor cataclysmique
d’un rêve dont la fuite est le rêve d’une fuite sans fin

embarqué en eaux mortes, dans une coque de noix
en mémoire de nos oublis, peau fripée, sabre de bois